Comment prévenir la souffrance psychique des personnes âgées en établissement ? Le directeur de l’ANESM répond aux lecteurs de Retraite Plus


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Comment prévenir la souffrance psychique des personnes âgées en établissement ? Le directeur de l’ANESM répond aux lecteurs de Retraite Plus
Comment prévenir  la souffrance psychique des personnes âgées en établissement ? Le directeur de l’ANESM répond aux lecteurs de Retraite Plus

Mieux accompagner nos ainés et prévenir à tout prix le suicide des personnes âgées, font partie du combat mené par l'Agence Nationale de l’Évaluation et de la qualité des Établissements et Services Sociaux et médico-sociaux (ANESM). Celle-ci vient de publier toute une série de recommandations de bonnes pratiques pour les professionnels de santé, notamment ceux exerçant dans les EHPAD et maisons de retraite, afin de repérer et de traiter la souffrance psychique des personnes âgées.

 

1. Pourquoi l’ANESM a fait le choix d’élaborer des recommandations sur cette thématique?

La question de la souffrance psychique des personnes âgées est une réalité souvent banalisée. En effet, les expressions possibles de cette souffrance (ralentissement psychomoteur, repli sur soi, somatisation etc.) sont facilement mises sur le compte seul de l’âge.
Par ailleurs, les personnes âgées constituent une population à risque face au geste suicidaire.

En 2010, 28 % des suicides ont concerné des personnes âgées de 65 ans et plus (3000 personnes environ). Selon les analyses épidémiologiques, près de 90 % des suicides des personnes âgées sont en lien avec un trouble psychiatrique, et particulièrement un état dépressif.

Face à ces constats, les orientations des plans de santé publique successifs ont visé à contribuer à la promotion de la bonne santé physique et psychique des personnes âgées, ainsi qu’à l’amélioration de leur environnement de vie par le développement d’actions de prévention, dans l’objectif d’«améliorer la prévention, le dépistage et les soins des troubles psychiques d’apparition courante au moment du vieillissement (troubles dépressifs, troubles anxieux, troubles du sommeil…) qui sont largement banalisés, sous diagnostiqués et sous traités ».

L’élaboration des recommandations s’est inscrite dans ce contexte de forte mobilisation des acteurs sur la question de la dépression et du suicide des personnes âgées.

L’amélioration du repérage des situations de souffrance psychique ou de dépression constitue ainsi un réel enjeu de santé publique visant notamment à réduire le nombre de passages à l’acte suicidaire. Tel est l’objectif de ces nouvelles recommandations de bonnes pratiques professionnelles, en identifiant des pistes d’actions aux professionnels, (d’accompagnement et d’encadrement au sein des établissements d’hébergement pour personnes âgées et des services à domicile) pour l’amélioration de la prévention, du repérage et de l’accompagnement vers une prise en charge de la souffrance psychique.

2. Les aidants ont une place centrale dans ces recommandations. Une attention est portée à ces derniers au même titre que pour la personne en souffrance psychique. Pourquoi ?

En effet, les recommandations portent également sur la souffrance psychique des aidants, et particulièrement des aidants eux‐mêmes âgés (conjoint, enfant vieillissant).
Le rôle d’aidant peut amener à un épuisement physique ou moral pour diverses raisons : fatigue physique liée aux aides apportées à son proche, incompréhension des attitudes et comportements du proche aidé, anxiété quant à l’éventuelle progression de la pathologie et/ou de la situation de dépendance, difficulté à assumer quotidiennement une dépendance nouvelle ou une altération du caractère, etc. La souffrance de la personne accompagnée/accueillie et celle du ou des aidant(s) sont souvent intriquées, dépendantes l’une de l’autre et chacun doit donc être considéré avec autant d’importance. C’est pourquoi il semblait nécessaire de porter une grande attention aux aidants au sein de ces recommandations.

3. Quelles sont les recommandations de l’ANESM pour que les professionnels puissent mieux anticiper l’apparition d’une éventuelle souffrance psychique ?

 L’avancée en âge peut être à l’origine de questionnements (sur son passé, son avenir, le sens de la vie, etc.) voire d’une souffrance existentielle, particulièrement au grand âge.

Par ailleurs, la perte des repères ou le sentiment d’intrusion potentiellement générés par l’entrée en EHPAD ou par la mise en place d’un soutien à domicile peuvent également être sources de souffrance psychique.
La prévention concerne alors l’évolution possible vers une souffrance psychique durable qui impacte les capacités d’adaptation de la personne.
Les professionnels des établissements et services contribuent à la prévention de l’apparition ou de l’installation durable de cette souffrance psychique liée à l’accueil en EHPAD/la mise en place d’une aide à domicile :

  • Par la qualité des premiers contacts, du pré-accueil, de l’accueil, de l’élaboration du projet personnalisé.
  • Par la qualité de l’accueil et/ou de l’accompagnement proposé au long cours ;
  • Par une culture du partage précoce d’informations lorsqu’une situation de souffrance psychique est repérée, sans attendre la situation de crise.

4. Comment accompagner les professionnels confrontés au quotidien à la souffrance psychique des personnes âgées ?

 Par manque de formation/information/outils disponibles, les professionnels qui font face à la souffrance psychique des personnes âgées peuvent se sentir démunis et ne pas savoir à qui/comment/quand/pourquoi transmettre ce dont ils sont dépositaires. Par ailleurs, certains professionnels d’accompagnement peuvent ne pas se sentir « légitimes » à transmettre ce qu’ils ont repéré chez une personne âgée accueillie/accompagnée.

Pour pallier ces difficultés, les recommandations sont alors:

  • De développer les « savoirs » des professionnels, par des formations spécifiques, notamment sur la souffrance psychique et le risque suicidaire des personnes âgées, afin de les alerter sur ces sujets ;
  • De favoriser le « savoir‐faire » et le « savoir‐être » des professionnels, par la mise en place de temps de réflexion collective autour de situations sensibles voire de séances d’analyses des pratiques, en proposant une aide dans le travail de repérage mais aussi un soutien adapté aux professionnels qui en auraient besoin (notamment lorsqu’il y a eu passage à l’acte), etc.

5. Comment identifier le risque, l’urgence, la dangerosité face à des idées de mort ?

Il est important de rappeler en premier lieu que les préoccupations liées à la mort peuvent être un sujet très fréquemment évoqué par les personnes âgées. Si ces propos restent isolés, ils ne traduisent pas systématiquement une réelle volonté de se donner la mort mais plutôt une préoccupation sur la fin de leur vie.

Ainsi, les recommandations visent à promouvoir des pratiques permettant d’effectuer cette distinction entre des propos suicidaires et des propos en lien avec la mort.

Le risque suicidaire est une estimation de la probabilité à plus ou moins long terme qu’une personne réalise un geste suicidaire. L’évaluation du risque suicidaire tient compte du vécu de la personne, de son histoire de vie, des pertes subies, de son état de santé psychique ou encore des éventuelles tentatives de suicide antérieures. L’urgence suicidaire correspond à la probabilité élevée qu’une personne ayant des idées de mort passe à l’acte dans les 24 à 48h suivantes.

Plusieurs éléments sont à prendre en compte dans l’appréciation du degré d’urgence parmi lesquels :

  • Les facteurs d’urgence témoins de l’imminence d’un geste (intensité des propos suicidaires, temporalité évoquée par la personne, précisions par la personne du lieu et des modalités de l’acte suicidaire envisagés) ;
  • Les facteurs de dangerosité comme l’accessibilité et la létalité du moyen envisagé.

6. Comment les établissements et services peuvent faire face à une crise suicidaire ?

L’organisation par le service ou l’établissement du repérage et de la gestion des situations de crise doit être anticipée par l’encadrement et nécessite, pour être efficace, d’être connue de l’ensemble des professionnels.
Les professionnels peuvent avoir à gérer des situations de crise, avec risque de passage à l’acte rapide.

En effet, les analyses épidémiologiques mettent en évidence une utilisation plus fréquente par les personnes âgées de moyens de suicide violents, ce qui est une des explications d’un nombre élevé de suicides aboutis.
Au domicile de la personne ou en établissement, les professionnels du secteur social et médico‐social confrontés à une telle situation ne peuvent ni ne doivent la gérer seuls.
Les recommandations formulées visent à guider les établissements et services dans la mise en place de protocoles d’action clairs, connus des professionnels et soutenant pour ces derniers. Lorsque des signes de souffrance psychique sont repérés, les professionnels des établissements et services sont amenés à analyser ce qui peut être mis en place au sein de leur propre service/établissement. Il s’agit d’une analyse en équipe, soutenue par l’encadrement. Et également à identifier ce qui doit être transmis, relayé à d’autres professionnels ressources en mesure de poser un diagnostic et/ou proposer une prise en charge adaptée : médecin traitant, secteur psychiatrique ou gérontologique et  psychologique.

Propos recueillis par Retraite Plus Organisme gratuit d'orientation en Maison de Retraite
Numero vert : 0800 941 340

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